Ce numéro de Document de travail s’intéresse aux variations à long terme des effectifs de salariés français exposés aux « facteurs de pénibilité », définis par la législation française lors des réformes des retraites de 2010 et 2014 comme les contraintes ou nuisances « susceptibles de laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur sa santé ». Les analyses présentées mobilisent les enquêtes Sumer (Surveillance Médicale des Risques Professionnels) menées par des médecins du travail en 2003, 2010 et 2017. Les questionnaires ayant été élaborés bien avant la promulgation du décret de 2011 sur la pénibilité, les évaluations des populations concernées par cette réglementation sont approximatives, mais leurs variations au fil du temps permettent d’appréhender les tendances de cette « pénibilité » - celle visée par le décret, avec des seuils d’exposition élevés. Pour certains facteurs étudiés (manutentions de charges lourdes, bruit, agents chimiques dangereux, travail répétitif), on constate une baisse de ces expositions, selon l’âge, la génération, ou la période étudiée, et parfois ces trois dimensions à la fois. Pour d’autres (postures pénibles, vibrations, températures extrêmes, travail en équipes alternantes avec horaires de nuit), les variations sont plus irrégulières ou très faibles. Ces résultats peuvent alimenter les réflexions sur les politiques de prévention en prenant en compte des dimensions de long terme.